1795 : quand les loups rodaient autour de Parentis-en-Born

Nous sommes le 12 germinal an 3 [1er avril 1795] et la municipalité de Parentis-en-Born se réunit sous la présidence du maire Etienne Pomade : à l’ordre du jour, les élus souhaitent organiser une battue contre les loups et les chiens enragés qui « infestent la commune, rodent et  commettent des ravages ».

Rappelons rapidement que la France est en pleine Révolution, qu’elle sort à peine de la Terreur et qu’elle est en guerre contre presque toute l’Europe. La plupart des armes a été réquisitionnée, ainsi que presque toutes les cartouches. L’usage des fusils de chasse est fortement contrôlé : la municipalité doit donc demander l’autorisation au Directoire du département.

Une autre personnalité est présente à la réunion, c’est le citoyen Lalesque père, qui est agent national de Parentis : ce représentant de l’Etat soutient la municipalité et demande l’aide d’un concitoyen, Bernard Turgan, habitant de Lahitte.  Ce dernier occupe un poste important : il est inspecteur général des vigies des côtes maritimes du département des Landes, chargé de surveiller les bateaux qui s’approchent du rivage. A ce titre, il contrôle un stock de cartouches, dont 190 qui n’ont pas été réquisitionnées par l’armée des Pyrénées et ne peuvent être utilisées qu’avec des fusils de chasse : Bernard Turgan rédige une lettre qui demande l’autorisation d’utiliser ces cartouches.

La réponse ne se fait pas attendre : « Le Directoire du département, considérant que les ravages dont se plaint la municipalité de Parentis sont trop affligeants pour qu’il soit permis de négliger aucun des moyens propres à les faire cesser que quoique les cartouches qu’elle demande n’aient d’autre destination que le service des côtes et des vigies, il doit sans aucun doute être permis de les employer à un usage bien légitime, celui de se défendre contre des bêtes féroces ». Le Directoire avait déjà été sensibilisé à ce problème car un mois plus tôt, le 11 ventôse an 3, une loi accordant une prime pour la destruction des loups avait été votée.

Ainsi, Bernard Turgan reçoit l’autorisation d’utiliser les dites cartouches qui seront distribuées pour être utilisées par les chasseurs, à charge de s’assurer qu’elles ne seront employées à d’autre usage « qu’à la chasse des loups & des chiens enragés ».

Pendant toute la première moitié du 19e siècle, le Conseil général règlera des primes aux chasseurs d’animaux nuisibles : c’est ainsi que l’on a conservé quelques éléments qui nous permettent d’estimer à environ un millier de loups qui auront été tués pendant cette période. Les listes nominatives nous apprennent que le dernier loup à avoir été abattu à Parentis-en-Born l’a certainement été en avril 1831, par Pierre Dupis qui reçut une prime de 15 Francs pour une louve non pleine.

Les rapports du préfet signalent encore en 1856 un assez grand nombre de loups dans les forêts de la Grande-Lande, mais aucune prime n’est réclamée par les chasseurs. Il note en 1858 que les bêtes fauves sont assez rares : la prime disparaît en 1868, et le sujet ne fait guère plus parler de lui… que dans les veillées, pour effrayer les enfants.

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Une version de ce texte a été publiée dans "Parentis Point i" n°151, d'août/septembre 2013.

© Gilles Dubus

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