Le naufrage de l'Aurore sur les côtes de Parentis en 1794

Le deuxième jour des sans culotides de l’an deux de la République française une & indivisible [18 septembre 1794], le citoyen Antoine Lalesque, agent national de la commune de Parentis-en-Born, prend sa plus belle plume et rédige un courrier au Directoire du département des Landes pour prévenir les autorités qu’un navire hambourgeois vient de s’échouer sur la côte, dans le territoire de la commune.

 

Nous pouvons être surpris par cette information, pourtant, elle est exacte : en 1794, Parentis-en-Born possédait environ trois kilomètres de rivage et de dunes en bordure de mer : le cadastre napoléonien de 1807 en témoigne.

Le navire naufragé s’appelle « L’Aurore », il vient de la ville libre de Hambourg, et il se rendait à Bordeaux pour vendre sa cargaison de toiles de toutes espèces, de coton, de cires, de verres, de cuivre et de cacao. L’aide des Parentissois, sous la direction du maire, Jean Ducourneau, permet de sauver la marchandise.

 

Le Directoire promulgue un arrêté 2 jours plus tard : il décide de réquisitionner les toiles, qui sont d’utilité nationale et qu’il destine aux besoins de l’armée « victorieuse » des Pyrénées occidentales, ainsi que le savon car il n’y en a plus dans le département depuis plusieurs mois, et le cuivre destiné à la fonderie de canons de la République, à Toulouse.

 

Mais le citoyen Meyer, agent du commerce de la République de Hambourg, proteste. Sa réaction est entendue par Monestier de la Lozère, député en mission dans les Landes pour installer le gouvernement révolutionnaire, qui lève la réquisition : il faut dire que la France vient de conquérir la Belgique et la Hollande et fait preuve d’une certaine bienveillance à l’égard des villes hanséatiques.

 

Quelques mois plus tard, en avril 1795, la situation a peu évoluée : Meyer ne trouve pas de moyens pour ramener sa marchandise à Bordeaux, le navire échoué est pillé et une partie de sa cargaison a disparu.

 

Cinq ans après cet évènement, François de Neufchâteau remet un rapport au département, dans lequel il dit des habitants du littoral landais : au bord de la mer, une côte plate, fertile en naufrages, les avaient habitué au brigandage : il n’échouait pas un navire, à quelque nation qu’il appartînt, qui ne fût inexorablement pillé, et l’équipage dépouillé. Ce droit d’aubaine leur paraissait si légitime que les habitants des communes ou le bâtiment avait échoué ne souffraient pas que ceux des communes environnantes vinssent prendre part au butin. Il s’élevait des rixes à ce sujet : la Révolution a tempéré ce penchant.


Nul doute qu’en 1799 le naufrage de l’Aurore est encore dans les mémoires….



© Gilles Dubus

Une version de ce texte a été publiée dans "Parentis Point i" n°149, de juillet 2013.


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